J'étais là depuis le matin. Encore une fois mon lit n'avait accueillit que ma personne ce qui n'était pas plus mal. Voir le monstre qui m'avait épousé était la dernière de mes envies, alors me retrouver avec lui, dans un lit. Je n'avais pu revoir Tobias depuis, comme s'il m'évitait, mais pourquoi le ferait-il ? Notre baiser avait été si magique, je voulais le revoir, je le devais. Alors ce matin-là je m'étais rendu sur le lieu de notre rencontre, celle qui avait conduit au toucher de nos lèvres. J'espérais qu'il vienne comme la dernière fois, mais il n'en fut rien. Alors, je me retrouvais seule avec le souvenir du battement de mon coeur, de la douce caresse de son baiser, de l'odieuse trahison de l'homme que j'aimais. Niklaus m'avait menti durant deux longues années et comme une idiote j'avais cru chaque mensonge qu'il m'avait servit. Mais cet écran de fumée qu'il avait créé fut balayé par la vérité de son coeur, aussi mort soit-il. Il n'y a pas pire souffrance que de se sentir trahie par l'élu, je peux vous l'assurer. Votre amour obtient votre confiance, votre dévotion, votre âme. L'Empereur s'était saisi de tout cela et les avait réduit en miette, arrachant mon coeur au passage. Mais il y avait Tobias, la lueur d'espoir dans les ténèbres qui enveloppaient ma vie. Sera-t-il différent ? Me fera-t-il souffrir ? Je ne pouvais en être sûr. Mais je l'étais pour Klaus. Je revis l'expression de son visage lorsque que je lui avais demandé de le dire, de dire qu'il m'aimait, mais il ne fit rien, car il n'y avait rien. Et des larmes réussirent à s'échapper de mes yeux, il suffisait d'y penser pour qu'elles coulent. Posé sur ce banc, la légère brise faisant voler mes cheveux, c'est ainsi qu'était mon quotidien désormais. Et ce le sera jusqu'à ce que je le vois enfin, lui.

« Bonjour Calypso » D'un geste rapide je séchai mes larmes tandis que Atia cueillait une fleur non loin du banc où j'étais assise. Puis, quand son regard se tourna vers moi de nouveau, je lui souris. « Que dirais-tu de m'accompagner au marché faire quelques affaires ? » Atia, est la soeur de mon époux, l'une des nombreuses, mais surtout celle avec qui je m'entends le mieux. Bien que parfois nous sommes en désaccord sur la vision du monde et de ses règles, je l'apprécie beaucoup et c'est une amie précieuse à mes yeux. Sa proposition était fort intéressante, me changer les idées était ce qu'il me fallait après tout. Alors, en me relevant pour prendre la fleur qu'elle avait cueillit, je la glissai dans sa longue chevelure noir et répondis. « Je serais ravie de t'accompagner Atia. » J'accompagnai mes mots d'un large sourire, comme s'il n'y avait pas eu de larme, comme s'il n'y avait aucune tristesse, comme s'il n'y avait rien.

Calypso avait l'air triste, mais je ne voulais pas m'attarder la dessus. D'une part parce qu'elle ne souhaitait visiblement pas en parler, d'autre part parce que la journée s'annonçait magnifique et que je ne voulais surtout pas la gâcher, à entendre des plaintes au sujet du comportement de mon frère. Niklaus était comme moi, entier, et rien ni personne ne le ferait changer. Les mains de Calypso s'approchèrent de moi, et elle glissa la fleur que je tenais juste auparavant dans la main dans mes cheveux. Cette fleur sentait divinement bon.
« Je serais ravie de t'accompagner Atia. »

Ah! Voilà qui me réjouissait. Nous allions passer une agréable journée toutes les deux sans aucune ombre au tableau. Enfin presque, puisque nous aurions l'obligation d'être escortée par des membres de la garde. Parce que si parfois, je parvenais à me faufiler hors du palais sans me faire remarquer, bon d'accord, disons que j'y parvenais toujours si je le voulais vraiment, lorsque je sortais faire des achats avec la femme de l'un des empereurs, personne ne nous laisserait sortir seules, même si j'aurais pu éliminer la moitié de la ville de Rome en une journée, si je l'avais vraiment voulu. Mais ça, peu de gardes impériaux le savaient, et encore moins de citoyens romains. Me mêler à eux avait le don de m'irriter, ces êtres inférieurs qui nous prenaient presque pour des dieux. Si seulement ils avaient ne serait ce qu'imaginé que nous soyons les coupables de la dite grande peste qui avait frappé Rome bien des siècles auparavant, ils nous jugeraient comme étant les pires fléaux que le monde ait connu. Nous n'étions ni des dieux, ni des fléaux, nous étions seulement devenus supérieurs à la race humaine. Je chassais vite ces idées meurtrières de ma tête pour retrouver mon sourire caractéristique.
"Tant mieux, j'en suis ravie. Je crains par contre que nous ne devions sortir avec une escorte, dis je en soupirant. Peu être que je pourrais me rassasier si j'ai envie d'un encas en chemin..."

Je me dirigeais vers l'intérieur du palais, en me mouvant gracieusement, où je dis au premier garde qui passait pas là.
"Prépare une escorte pour Calypso et moi même, nous nous rendons au marché. Pas de discussion, et fais vite si tu ne veux pas énerver une Juvenalis."


Je sentais la peur émaner de cet humain à mes propos. Son pouls s'accéléra subtilement, mais assez pour que je le perçoive de là où j'étais. Une chose était certaine, je ne risquais pas de me nourrir de lui. La peur donnait un goût affreux au sang. Non pas qu'il se doute de quoi que ce soit, non, il ne savait rien quand à notre véritable nature, mais il était de notoriété publique que lorsque que quelqu'un m'agaçait, il était châtié comme il se devait. Et même si la journée s'annonçait des plus fabuleuses, je n'avais aucune envie de perdre mon temps, la patience n'était toujours pas mon point fort en presque sept cent longues années.